L’automne s’installe, les feuilles des arbres rougissent puis tombent, marquant la fin du cycle de végétation pour de nombreuses plantes. Pour les propriétaires de pêchers et de nectariniers, cette période n’est cependant pas synonyme de repos. C’est le moment crucial pour engager une lutte préventive contre un ennemi redoutable : la cloque du pêcher. Loin d’être une simple maladie esthétique, cette affection fongique peut compromettre gravement la santé et la productivité des arbres. Une intervention à l’automne avec la bouillie bordelaise se révèle être la stratégie la plus efficace pour éviter une catastrophe au printemps suivant.
Comprendre la cloque du pêcher : symptômes et conséquences

Les signes visibles de l’infection
La cloque du pêcher, causée par le champignon Taphrina deformans, est une maladie qui se manifeste de manière spectaculaire au printemps. Les premiers signes apparaissent sur les jeunes feuilles qui viennent de débourrer. Celles-ci se déforment, s’épaississent et présentent des boursouflures caractéristiques. Leur couleur vire au vert pâle, au jaune puis souvent à un rouge vif très reconnaissable. Les feuilles atteintes deviennent cassantes, se recroquevillent avant de se dessécher et de tomber prématurément, généralement vers le début de l’été. Cette chute massive de feuilles est le symptôme le plus alarmant pour le jardinier.
Les conséquences à long terme pour l’arbre
Une attaque de cloque n’est jamais anodine. Si l’arbre peut produire une seconde pousse de feuilles pour compenser les pertes, cet effort l’épuise considérablement. Les conséquences sont multiples et s’aggravent d’année en année si aucun traitement n’est appliqué :
- Affaiblissement général : l’arbre puise dans ses réserves pour refaire son feuillage, ce qui le rend plus vulnérable à d’autres maladies et aux parasites.
- Baisse de la production : la photosynthèse étant fortement réduite par la perte des feuilles, la formation des fruits est compromise. La récolte de l’année est souvent faible, voire inexistante.
- Mortalité de l’arbre : des attaques répétées sur plusieurs années (généralement 3 à 5 ans) peuvent entraîner la mort pure et simple du pêcher, totalement épuisé par sa lutte contre la maladie.
Il est donc impératif de ne pas considérer cette maladie comme un simple désagrément passager mais comme une menace sérieuse pour la survie de vos arbres fruitiers.
La compréhension des symptômes et des risques est la première étape. Il faut maintenant se pencher sur l’origine de cette maladie pour mieux la combattre à la source.
Origine et développement de la cloque du pêcher
Le coupable : Taphrina deformans
Le responsable de la cloque est un champignon microscopique nommé Taphrina deformans. Ce pathogène a un cycle de vie bien rodé qui lui permet de survivre aux conditions hivernales pour frapper avec force au printemps. Il ne s’attaque pas seulement aux pêchers mais peut également affecter les nectariniers et les amandiers. Le champignon se propage par des spores, qui sont les agents de la contamination.
Le cycle de vie du champignon
Comprendre le cycle du Taphrina deformans est la clé pour mettre en place une stratégie de lutte efficace. Durant l’été et l’automne, les spores produites par les feuilles malades sont disséminées par le vent et la pluie. Elles viennent se loger dans les anfractuosités de l’écorce, sur les écailles des bourgeons et autour des branches. C’est là qu’elles vont passer l’hiver, en état de dormance, attendant des conditions favorables pour germer. Au printemps, un temps frais et humide (des températures comprises entre 10°C et 16°C) au moment du débourrement des bourgeons est idéal pour le champignon. Les spores germent et infectent les toutes jeunes feuilles, provoquant les symptômes décrits précédemment. Le traitement doit donc viser à détruire ces spores avant qu’elles n’aient la possibilité d’infecter l’arbre.
Face à ce cycle bien établi, une solution fongicide historique a largement fait ses preuves : la bouillie bordelaise.
Bouillie bordelaise : composition et avantages
Une recette historique et éprouvée
La bouillie bordelaise n’est pas un produit moderne issu de la chimie de synthèse. Son invention remonte à la fin du 19ème siècle dans le vignoble du Médoc. Il s’agit d’un mélange de sulfate de cuivre et de chaux éteinte. Le cuivre est l’élément actif, un fongicide puissant qui agit par contact en détruisant les spores des champignons. La chaux, quant à elle, sert à neutraliser l’acidité du sulfate de cuivre pour éviter de brûler les végétaux et à améliorer l’adhérence du produit sur les plantes. Sa couleur bleue caractéristique permet de visualiser facilement les zones traitées.
Les propriétés fongicides et bactéricides
L’avantage principal de la bouillie bordelaise est son large spectre d’action. Elle n’est pas seulement efficace contre la cloque du pêcher. Elle est utilisée pour prévenir et traiter de nombreuses autres maladies cryptogamiques (causées par des champignons) qui affectent le potager et le verger, comme le mildiou de la vigne et de la tomate, la tavelure du pommier ou encore certaines bactérioses. C’est un produit polyvalent, autorisé en agriculture biologique, qui constitue un pilier de la protection des cultures pour de nombreux jardiniers. Son action est purement préventive : elle empêche la germination des spores mais ne peut pas guérir une feuille déjà atteinte.
L’efficacité de ce produit dépend entièrement du moment choisi pour son application, ce qui nous amène à la période automnale.
Pourquoi l’automne est la saison idéale pour le traitement
Agir avant l’hibernation du pathogène
Le traitement automnal est l’intervention la plus importante de l’année. En pulvérisant la bouillie bordelaise juste après la chute de toutes les feuilles, on cible directement les spores du champignon qui cherchent à s’installer sur l’arbre pour y passer l’hiver. L’objectif est simple : réduire drastiquement la quantité d’inoculum présent sur le pêcher. Moins il y a de spores survivant à l’hiver, moins le risque d’infection sera élevé au printemps suivant, même si les conditions météorologiques sont favorables au développement de la maladie. Cette première pulvérisation assainit l’arbre et le prépare à affronter la saison froide.
Un calendrier de traitement en deux temps
Pour une protection optimale, un seul traitement ne suffit pas. Le protocole de lutte contre la cloque du pêcher repose sur deux applications stratégiques. Voici un tableau comparatif pour bien visualiser leur rôle respectif.
| Traitement | Période | Objectif principal | État de l’arbre |
|---|---|---|---|
| Traitement d’automne | Octobre / Novembre | Détruire les spores avant leur hibernation, assainir l’arbre. | Chute complète des feuilles. Arbre en dormance. |
| Traitement de fin d’hiver | Février / Mars | Protéger les bourgeons au moment de leur gonflement. | Juste avant l’ouverture des bourgeons (stade « pointe verte »). |
Le traitement de fin d’hiver vient compléter celui de l’automne en créant une barrière protectrice sur les bourgeons au moment le plus critique, lorsque l’arbre redevient vulnérable. Omettre le traitement d’automne revient à laisser le champignon s’installer confortablement pour l’hiver.
Maintenant que le calendrier est clairement établi, il est essentiel de maîtriser la méthode d’application pour garantir l’efficacité du traitement.
Application efficace de la bouillie bordelaise contre la cloque
Préparation et dosage
La bouillie bordelaise se présente généralement sous forme d’une poudre bleue à diluer dans l’eau. Il est impératif de respecter scrupuleusement les doses indiquées par le fabricant sur l’emballage. Un surdosage peut être phytotoxique (toxique pour la plante) et un sous-dosage la rendra inefficace. Pour la préparation, il est conseillé de réaliser une « bouillie mère » : délayez la quantité de poudre nécessaire dans un petit volume d’eau avant de verser ce mélange dans le volume d’eau total, tout en remuant énergiquement. Portez des équipements de protection individuelle : des gants et des lunettes sont recommandés pour manipuler le produit.
La technique de pulvérisation
L’application doit être méticuleuse. Armez-vous d’un pulvérisateur de jardin et assurez-vous de traiter par temps calme, sans vent pour éviter la dispersion du produit, et sans pluie annoncée dans les 24 heures suivantes pour ne pas qu’il soit lessivé. La pulvérisation doit couvrir l’intégralité des parties aériennes de l’arbre : le tronc, les branches charpentières, les rameaux et les moindres brindilles, en insistant sur la zone des bourgeons. L’arbre doit être « bleui » de la tête aux pieds, jusqu’au point de ruissellement. N’oubliez pas non plus de pulvériser le sol au pied de l’arbre où des feuilles malades auraient pu tomber, après les avoir ramassées et détruites (ne les mettez pas au compost).
- CON:P B45045 Pulvérisateur Pompe à Main/Buse 5 L
- Ribimex Nébuliseur 5L, multicolore, 18,5 x 18,5 x 39,5 cm
- CON:P B45041 Pulvérisateur à Pression de Jardin 2 l avec réservoir à Pression Stable et buse réglable en Laiton, Multicolore
Bien que redoutablement efficace, la bouillie bordelaise n’est pas la seule arme à la disposition du jardinier.
Alternatives et compléments à la bouillie bordelaise
Les solutions préventives culturales
La lutte contre la cloque commence par de bonnes pratiques au jardin. Ces gestes de bon sens permettent de créer un environnement moins favorable au champignon :
- Choisir des variétés résistantes : certaines variétés de pêchers comme ‘Reine des vergers’ ou ‘Benedicte’ sont réputées moins sensibles à la cloque. Renseignez-vous lors de l’achat.
- Assurer une bonne aération : une taille régulière de l’arbre permet à l’air et à la lumière de mieux circuler au sein de la ramure. Un feuillage qui sèche plus vite après une pluie est un feuillage moins exposé au développement des champignons.
- Soigner la plantation : plantez votre pêcher dans un endroit ensoleillé et bien drainé. Évitez les zones confinées et trop humides.
D’autres traitements naturels ?
Certains jardiniers expérimentent d’autres solutions en complément ou en remplacement du cuivre. Les décoctions de prêle, riches en silice, visent à renforcer les défenses de la plante. Les macérations d’ail auraient également des propriétés fongicides. Si ces méthodes peuvent jouer un rôle de soutien dans le cadre d’une approche globale, leur efficacité seule face à une forte pression de la maladie reste bien inférieure à celle de la bouillie bordelaise, qui demeure le traitement préventif de référence contre la cloque du pêcher.
La cloque du pêcher n’est pas une fatalité. Une stratégie de lutte bien menée, centrée sur un traitement préventif à la bouillie bordelaise à l’automne, est la meilleure garantie de voir ses arbres en pleine santé et de savourer de délicieuses pêches l’été suivant. Cette intervention, couplée à une seconde application à la fin de l’hiver et à des pratiques culturales saines, permet de contrôler efficacement cette maladie dévastatrice. Le jardinier prévoyant est un jardinier récompensé.
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